L'angoisse du gardien de but au moment du tir de Just Fontaine
« Just une légende » titrait le journal « L’Equipe » pour rendre hommage à Just Fontaine, on ne démentira pas cette « Une » élogieuse pour celui qui a donné ses lettres de noblesse au Football et qui vient de s’éteindre à 89 ans à Toulouse, cette « Capitale » du Rugby où il résidait depuis plusieurs décennies, en y menant une vie autant paisible que discrète.
Il avait vu le jour en 1933 à Marrakech, l’une des quatre villes impériales du Maroc, où son père était fonctionnaire à la Régie Nationale des Tabacs. Le futur « Justo » (surnom donné par sa mère d’origine Espagnole) grandira là auprès de ces six frères et sœurs.
Enfant, il commence à taper dans un ballon avec brio et intègre le club local de « l’US Marrakech » où il jouera d’abord en équipe junior puis cadet avant d’intégrer « l’US Marocaine » comme Sénior entre 1950 et 1953 et c’est là qu’il sera « repéré » par Mario Zatelli, figure de l’Olympique de Marseille et alors Entraineur de l’OGC Nice qui l’intègre dans ces rangs à quelques encablures de la Baie des Anges…
C’est donc là que débutera la courte carrière de « Justo » : seulement une décennie mais dont les débuts seront fracassants dans le club Azuréen : près de 44 buts en trois saisons et deux trophées à son actif : la Coupe de France en 1954 et le Championnat en 1956 !...
Après avoir passé trente mois sous les drapeaux, via le Bataillon de Joinville, il intégrera le prestigieux club du Stade de Reims » incarné jusqu’alors par un certain Raymond Kopa, premier « Ballon d’Or » Français de l’Histoire et nouvelle recrue du « Real de Madrid » …
Les deux hommes vont se côtoyer durant la Coupe du Monde Football 1958 qui se déroule en Suède et qui va les faire rentrer dans la légende du sport : Kopa comme l’un des plus grands joueurs Français (avec plus tard Platini et Zidane, en attendant Mbappé) et Just Fontaine pour son incroyable festival de buts.
Pourtant, il faut bien avouer que le faible écho médiatique (la Télévision n’est présente que dans 10 % des foyers) et les effectifs rachitiques de supporters (environ 200) n’auguraient en aucun cas une quelconque performance des « Bleus » ni un engouement des Français, très remontés contre les piètres performances constatées de l’équipe lors de la précédente Coupe du Monde de 1954
Il est clair que les 22 hommes menés par Albert Batteux avaient alors un gros défi à relever et pourtant ils atteindront le stade des demi-finales après avoir éliminé auparavant des adversaires coriaces, en commençant par le Paraguay par 7 buts à 3, puis la Yougoslavie, l’Ecosse et l’Irlande du Nord.
Just Fontaine fait partie des attaquants, au même titre que Raymond Kopa, Roger Piantoni et Jean Vincent et ne va pas tarder à inscrire treize buts durant la compétition, ignorant alors que 65 ans plus tard son record n’a toujours pas été battu !
Pourtant, le rêve d’accession à la Finale sera brisé par la confrontation contre le Brésil qui contient dans ses rangs Zito, Zagallo, Vava, Garincha, Gilma et un novice de 17 ans, Edson Arantes do Nascimiento, plus connu sous le nom de Pelé..
Gênés par la blessure de son milieu de terrain, Roger Jonquet et peut-être tétanisés par l’enjeu, les « Bleus » s’inclinent par 5 à 2. Une défaite toutefois honorable et curieusement la dernière « essuyée » par la France face au Brésil qui n’a jamais réussi depuis à prendre le dessus face aux Français lors de leurs confrontations ultérieures (1986, 1998, 2006)..
A défaut de soulever la « Coupe Jules Simon », les vaillants « Bleus » remporteront la « Petite Finale » contre le tenant du Titre, l’Allemagne de l’Ouest avec un détonnant score de 6 buts à 3, enregistrant de facto leur meilleure performance depuis l’origine de la compétition tout en entamant également une longue période de « disette » jusqu’au « mitant » des années 80…
C’est une grave fracture qui mettra fin à la carrière de joueur de Just Fontaine au début des années 60 mais pas son implication dans le monde du football : il créera le premier syndicat de joueurs de football et deviendra même entraineur de l’Equipe de France mais avec sans véritable succès avant de s’occuper de la sélection Marocaine (il possédait d’ailleurs la double nationalité Franco-Marocaine) …
Juste à sa disparition, Just Fontaine est donc resté une référence dans le milieu du Football, appartenant à une époque où le « Football business » n’existait pas encore, issu d’une génération qui n’était pas passée par les centres de formation happé par l’appel alléchant de l’Etranger…
Toujours attentif et bienveillant avec cette nouvelle génération qui savait respecter « l’homme aux treize buts » et qui même devenue par la suite deux fois championne du monde n’est pas sûr d’égaler un jour ce record de 1958…
En attendant, l’homme paisible qui sillonnait en solo les rues de la Ville Rose est parti rejoindre quelque part dans les étoiles, l’homme aux «mille buts », vous savez le jeunot Brésilien devenu « roi » qu’il avait affronté en 1958, nul doute qu’ils auront beaucoup de choses à se dire, avant le coup de sifflet de l’arbitre et sous le regard angoissé du gardien de but au moment d’un énième tir cadré….
La Place de l'Etoile
La France est Championne du monde !
Incroyable mais vrai ? Non, ce n’est pas ce que vous croyez,: je veux parler en fait de sa suprématie incontestée en équipement de « ronds-points. Un véritable record mondial : plus de 30 000 à travers les quatre coins de l’Hexagone, et qui continue d’en créer plus de 500 chaque année !
Plus de la moitié des giratoires construits dans le monde le sont en France. A noter que cet engouement pour ces espaces circulaires est souvent de facture récente puisque la majorité d’entre eux ont pullulé depuis le début des années 80…
Auparavant, c’était de l’autre côté de la Manche, au cœur de la perfide Albion que les « round abouts » comme on les surnommait là-bas , ont connu leur apogée, à la périphérie des « villes nouvelles » mais aujourd’hui, ils y sont trois fois moins nombreux que chez l’ex-ennemi héréditaire…
Mais ici comme de l’autre côté du Channel, l’idée de leur profusion correspondait à une farouche volonté de diminuer de façon sensible la densité du trafic routier (voire sa congestion), de réduire le risque accidentogène mais également de se débarrasser des feux tricolores afin de pouvoir gagner du temps sur les trajets quotidiens…
Pourtant, c’est bien en France que sont nés les premiers « ronds-points », très exactement en 1906, dont les premières conceptions sont attribuées à l’architecte Eugène Hénard, dont le dessein était de limiter les accidents « hippomobiles », fruit d’une circulation quelque peu anarchique…
On pense bien sûr à celui de « la Place de l’Etoile » (rebaptisé « Charles de Gaulle ») situé autour de « l’Arc de Triomphe », véritable « cauchemar » pour le conducteur débutant où pour l’automobiliste provincial peu au fait de la circulation parisienne... et où l’on persiste à pratiquer la « priorité à droite » a contrario de tous les autres ronds-points, entrainant alors une modification des règles du permis de conduire en 1983…
Le rond-point s’est donc beaucoup développé au sein de nos banlieues, dans le but de se transformer en un point de convergence notable de plusieurs axes routiers bordés de lotissements interminables mais également au cœur des forêts giboyeuses où il a servi de vigie aux chasseurs « à courre » ou au promeneur parfois égaré en quête de reconnaissance.
La Décentralisation aidant, le « rond-point » est devenu le nouveau « cheval de bataille » de l’élu du coin, « sa marque de fabrique », arguant du fait que ce point de convergence routier coûtait moins cher et était plus efficace que les feux tricolores et surtout plus esthétiques, d’où l’émergence d’un décorum parfois « tape à l’œil » : bateaux fleuris, statues, scènes champêtres, etc…
Des « ronds-points » où l’on reconnait que « tourner en rond ne mène nulle part » comme disait Raymond Devos mais qui affirme la défaite du Centralisme parisien où tout se décidait naguère et qui confirme la revanche de l’élu local sur la technocratie jacobine…
Mais voilà que le « rond-point » a récemment troqué la « convergence des routes » en « convergence des luttes », en témoigne son occupation lors de l’épisode insolite des « Gilets Jaunes », ces hérauts de la « France invisible » qui y ont élu domicile, les transformant en « ilots » de revendication, visible par tous (surtout des automobilistes mi-solidaires, mi-agacés) mais également de havre de« fraternité » entre « compagnons d’infortune de la France périphérique ».
Après le rond-point, lieu stratégique du politiquement correct, le voici transformé en aire de contestation et du chant de la révolte...
« Va sur les ronds-points pour avoir vu sur le monde » comme le chantait l’inénarrable Francis Lalanne, lui-même poussant la chansonnette sur ces « oppidums » de la colère sourde, mais étant malheureusement plus proche du barde Assurancetourix que de Bob Dylan…
Avec le feuilleton mouvementé de la « réforme des retraites » , les ronds-points ont recommencé à être envahis par cette « armée des ombres » tandis que nos élus continuent d’en faire pousser d’autres minutieusement à travers les routes de nos vertes campagnes et de nos villes afin de les faire mieux converger….
Allez, encore un dernier rond-point pour la route...