Initiales J.B

Jane Birkin

(1946-2023)

 

Elle a été retrouvée morte chez elle à Paris, ce dimanche 16 juillet 2023, ayant succombé à un accident vasculaire cérébral, le deuxième en deux ans et celui aura été fatal. Elle avait 76 ans, ayant rendu l’âme dans un pays où elle débarqué un beau jour de 1968.


Cette disparition de Jane Birkin, artiste franco-britannique qui aimait dire qu’elle était « européenne » a causé une vive émotion aussi bien dans le grand public que dans le milieu artistique qui aimait autant sa simplicité que sa carrière éclectique…

 

Née de l’autre côté de la Manche en décembre 1946, fille de l’aviateur David Birkin qui s’était illustré pendant la Deuxième Guerre mondiale en parachutant des résistants français et d’une actrice, Jane Campbell qui connut une longue et brillante carrière Outre-Manche.


A 17 ans, elle embrasse également la carrière artistique au cœur du « Swinging London » ce mouvement qui fait de Londres une Capitale de la Pop Culture et de la mode, en débutant dans le film « The Knack » réalisé par Richard Lester, où elle côtoie deux autres débutantes : Charlotte Rampling et Jacqueline Bisset. Le film obtient d’ailleurs la Palme d’Or à Cannes en 1965.

 

Pendant le tournage, elle avait la connaissance du compositeur du film, John Barry (à qui l’on doit également le célèbre générique de : « Amicalement vôtre ») qu’elle épouse aussi rapidement qu’elle divorcera, le couple aura une fille, Kate.

En 1967, elle tourne avec Antonioni, « Blow Up » avec David Hemmings qui obtient également la récompense suprême sur la Croisette. L’année suivante, elle décide de franchir le « Channel » et part à la conquête de Paris où elle doit tourner « Slogan » réalisé par Pierre Grimblat. Sa route va croiser celle d’un partenaire de jeu, Serge Gainsbourg.

Dans un premier temps, le courant ne passera pas bien entre les deux, ne laissant pas présager une quelconque relation. « Quand je l’ai vue la première fois, j’ai dit : qu’est ce que c’est que ce boudin ? » confiera un brin provocateur, l’auteur des « Sucettes » mal remis de la fin de sa liaison aussi courte que torride avec Brigitte Bardot.


Pourtant, le vent (celui-ci ne sera pas mauvais) inverse la tendance et les deux artistes vont entamer une liaison durable et devenir un des couples les plus glamour et des plus provocateurs de Paris. Gainsbourg, naguère, pygmalion de l’innocente France Gall va devenir celui de la petite anglaise qui ne parle alors qu’un Français très approximatif


Interviewés par Jacques Chancel, au cours d’une « Radioscopie »,  l’auteur de la « Gadoue » chanté par une  Pétula Clark plus « fluent in french » doit parfois faire la traduction aux questions posées à sa nouvelle promise..

Indéniablement « boosté » par cette nouvelle relation, Gainsbourg propose à sa belle de « réenregistrer » : « Je t’aime, moi non plus » un ode à l’amour fou et sans issue, il ressort donc des placards la première version écrite pour BB (que la star avait interdit pour éviter les foudres de son mari de l’époque, Gunther Sachs mais qui finira par ressortir quelques années après).

On connait la suite, cette nouvelle version deviendra un succès planétaire malgré son côté jugé sulfureux qui ne plait pas du tout aux oreilles chastes du moment, dont celle du Pape Paul VI …

Un long partenariat, à la ville comme sur scène commence alors qui durera activement bien au-delà de la rupture du couple douze ans après leur première rencontre.

De leur union naitra une fille Charlotte qui a réussi par la suite à se faire un prénom dans la chanson comme au cinéma…

Jane B enchaîne les succès discographiques écrits et composés par son mentor (souvent en duo) : « 69, année érotique », « l’Anamour », « la décadanse », sans oublier ce qui est considéré comme le chef-d’œuvre de Gainsbourg « Melody Nelson » un album-concept co-écrit avec Jean Claude Vannier, dont elle est le personnage central… sans oublier« Di doo dah », « ex-fan des sixties », « Johnny Jane » puis plus tard : « Baby alone in Babylone », « les dessous chics »…

Parallèlement, Jane B débute une carrière cinématographique en France, dès 1969, elle apparait dans « La Piscine » de Jacques Deray, avec Alain Delon, Romy Schneider et Maurice Ronet… , « les Chemins de Katmandou » d’André Cayatte  .On l’a découvre également comme « amante » de Brigitte Bardot dans « Dom Juan 73 » de Roger Vadim.


En ce début des années 70, elle ne va pas tarder à occuper la tête d’affiche, aussi bien dans les comédies : « la course à l’échalotte », « la moutarde me monte au nez » de Claude Zidi qui lui assure une grande popularité notamment avec Pierre Richard comme complice.

Actrice devenue bilingue, elle apparait dans des productions internationales dont «Meurtres sur le Nil » de John Guillermin, adaptation cinématographique d’un roman d’Agatha Christie avec Peter Ustinov…

En outre elle s’oriente vers des films d’auteurs plus ambitieux sous la direction de Régis Wargnier, Bertrand Tavernier, Jacques Rivette ou avec  son futur compagnon Jacques Doillon sans oublier Gainsbourg qui s’essaie à la réalisation avec le controversé « Je t’aime moi non plus » en 1975…

Elle se lancera dans l’aventure théâtrale avec Patrice Chéreau, au Théâtre des Amandiers à Nanterre où elle donnera la réplique à Michel Piccoli puis passera plus tard de l’autre côté de la caméra à plusieurs reprises, en réalisant notamment « Boxes » qu’elle interprète en compagnie de Géraldine Chaplin et toujours Michel Piccoli.

 

Toutefois, après la disparition de Serge Gainsbourg en 1991, certains pensent alors que sa carrière musicale étroitement liée à celle de son ex-complice risque d’être compliquée : ils se trompent, Jane B. saura faire appel à de nouveaux talents tout en continuant à entretenir son répertoire « Gainsbourgien ».

Elle prendra goût à faire de la scène, travaillera avec une nouvelle génération incarnée par Etienne Daho, Alain Souchon ou encore Arthur  H… et continuera sa longue et éclectique carrière jusqu’à une période récente avant que la maladie ne la rattrape.

Icône de mode dès son arrivée en France, avec ses chapeaux et ses tenues moulantes et provocantes, elle aimait rappeler qu’elle avait « relooké » Serge Gainsbourg et mis à la mode sa « barbe de 3 jours ». Au hasard d’un voyage en avion, elle rencontre le PDG d’Hermès, Jean-Louis Dumas et  se plaint de ne pas avoir un sac à main adapté à ses besoins : quelques temps après sera lancé le « sac Birkin » qui sera vendu à des milliers d’exemplaires.


Entre deux rives, la Franco-Britannique qui se désolait de l’épisode du Brexit fut également une militante active, en première ligne pour le combat contre l’homophobie, le racisme, le Front National ou encore le droit des femmes, des combats qu’elle mena activement jusqu’à la fin de ses jours….

Au niveau personnel, Jane Birkin partagea la vie de Jacques Doillon et son mode de vie un brin austère et paisible, très loin du tumulte de la rue de Verneuil où habitait « l’homme à la tête de chou ». Ensemble, ils ont eu une fille, Lou qui a elle-même embrassé la carrière artistique..


Mais Jane Birkin connaitra un drame personnel dont elle ne fera jamais le deuil , le suicide (par défenestration) de sa première fille, Kate Barry…

Plus discrète par la suite sur sa vie privée, la voici qui partagea son temps entre le centre de Paris et la Bretagne, en particulier à Lannilis, une localité du Finistère Nord non loin de Landerneau et de Brest, tout près de la plage où son père, officier de la Navy aidait la Résistance locale.  Très attachée à ce territoire et à ses habitants qui le lui rendaient bien, il est actuellement question de baptiser une rue de la commune « Jane et David Birkin ». ..

Jane Birkin qui avait d’ailleurs du « sang breton » dans les veines, car un de ses ancêtres, Charles II roi d’Angleterre aurait eu une liaison avec une aristocrate Bretonne, Louise de Kéroual (également chatelaine de Mousseau, à Evry, ndlr).

Un parcours riche et varié comme on a pu le constater marqué par plus d'un demi-siècle de carrière, que les médias ont eu trop tendance à relier au seul (même s’il fut primordial) Serge Gainsbourg, lors de sa disparition…. De nombreux hommages venus de personnalités politiques et artistiques ont été adressés à l'artiste, beaucoup parmi ceux qui l'avait cotoyée (Jack Lang, Etienne Daho, Brigitte Bardot, Pierre Richard, etc...).


Pour son dernier voyage, Jane Birkin a eu droit à une messe en l’Eglise St Roch de Paris, celle des artistes, que l’on applaudit comme il se doit avant qu’ils ne rejoignent leur dernière demeure mais comme aurait dit notre franco-anglaise préferée : « Show must go on » (« le spectacle continue »).